Le banc du balcon est glacé. La tête contre la balustrade, j'oublie d'oublier. Et peut être que c'est la mélancolie du quartier qui donne à mon esprit des raisons de trop penser. Ce matin, c'est pire et c'est indéniable. La brume sur mes yeux se dissipent et je vois clair sur ce que je préférais cacher. Quelque chose manque. Sans que je ne sache quoi. Si j'ouvre juste un peu les paupières, je vois le côté sale et caché des choses. Et c'est moche parce que c'est réel. J'ai envie d'y rayer, d'y écraser sous mes semelles, d'y bannir ne serait-ce que des frontières de mon cerveau. Mais. Il y a un énorme vide. Béant, sombre. Un trou à l'intérieur de moi. Des fissures sur mes convictions. Des crevassesdans mes horizons. Je marche et je coule, en fait je recule. Pourtant j'ai tout. Des yeux bruns et des bras chauds, des rires et des fêtes, des étreintes, des mains tendus, des étoiles. Et je fais tout pour. J'organise et j'harmonise. Je vais jusque dans l'artificiel, dans l'espoir ridicule de ressentir les mêmes étincelles d'avril. Mais le manque, qui suinte sous ma chaire me laisse toujours avec un genoux à terre. Et je me retrouve là, poussiéreuse et sans ressources. La volonté en miettes et le gout amer de la défaite. J'étais persuadée qu'en reconstruisant tout des racines jusqu'aux cimes, je trouverais à l'aube un nouveau soleil. Mais les rayons restent gris et l'astre n'est qu'un leurre. Alors je ne sais plus. Je suis fatiguée. Je n'ai plus envie de savoir.
Broken West - Perfect Games